Saturday, October 29, 2005

Le Rwanda au Congo Chronologie

Chronologie
Parution : 19/10/2002 Auteur : Centre d’information géopolitique

1998
2 août Début de la rébellion à l’est du pays. La 10ème Brigade des FAC, cantonnée à Bukavu et composée de Banyamulenge (tutsi du sud-Kivu) se soulève parce qu’elle refuse d’être dispersée dans d’autres régions du pays ; le Commandant de la Brigade est le Commandant Jean-Pierre Ondekane, ancien officier de Mobutu, originaire de l’Equateur et considéré comme un intime de James Kabahere, Tutsi rwandais, ex chef de l’état-major des FAC limogé par Kabila. Ondekane devient le chef de l’aile militaire du RCD, l’Armée Nationale Congolaise (ou ANC-RCD) Attaque des villes de Goma, Uvira et Bukavu par l’Armée Populaire Rwandaise (APR).
6 août / 1er septembre Echec de la marche des rebelles sur Kinshasa. 6 août : les Rwandais s’emparent de Kitona. Echec de la tentative de prise de Kinshasa par les rebelles et les rwandais, grâce à l’appui des troupes angolaises et zimbabwéennes à Kabila.
16 août Fondation dans l’Est à Goma (Kivu) du premier mouvement rebelle, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD).
23 août Prise de Kisangani par les rebelles du RCD et le Rwanda.
Septembre Combats à Goma.
30 septembre Naissance dans la province de l’Equateur du Mouvement de Libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba avec le soutien de l’Ouganda. Apparition publique du mouvement en novembre.
16 octobre Prise de Kindu (Maniema) par le RCD et les troupes rwandaises après une semaine de combats. Octobre Prise de Fizi, Baraka, Kalemie et Moba par l’APR et le RCD.
Novembre Le RCD s’empare de Gbadolite, sa première conquête militaire.
30 décembre / 1er janvier Combats de Makavola, (province d’Uvira) : 400 morts ; en représailles à une attaque supposée des maï-maï du 29/12/98, massacres de centaines de civils par le RCD qui les présente comme des miliciens hutus.
1999
5 mars Combats autour de Kamituga (Sud Kivu) 100 morts de civils imputées aux RCD lors de représailles.
9 mars Chute de la ville de Kindu aux mains des rebelles. avril Prise de Gemena et Zongo (à la frontière de la République Centre Africaine) par le MLC.
24 avril Prise de Bondo (Equateur) par le MLC.
Mai Retrait des troupes tchadiennes qui appuyaient Kabila.
11 mai Bombardement de Goma et d’Uvira par les FAC et leurs alliés (près de cinquante morts).
23 mai Combats entre factions rivales du RCD à Kisangani.
2 juin Uvira et l’aéroport de Bukavu sont bombardés par les FAC.
7 juin Manono, au Katanga, sous le contrôle des rebelles.
7 juillet Heurts interethniques entre Hemas et Lendus dans la province d’Ituri contrôlée par le RCD-ML : début des attaques de villages bahemas par des milices walendus dans la région d’Ituri qui feront 8000 morts en six mois, selon une ONG.
10 juillet Accords de Lusaka signés par les six pays belligérants : RDC, Ouganda, Rwanda, Namibie, Zimbabwe, Angola (ils ne seront réellement appliqués qu’en 2001). Au moment des accords de Lusaka, imposés par la pression internationale au Rwanda, ce dernier pays est en position de force et le régime de Kabila est menacé ; le front de guerre a atteint le Katanga et le Kasaï.
15 juillet Avancée des forces APR au-delà de la rivière Sankuru. Prise de Lusambo dans le Kasaï oriental. Les troupes du RCD et de l’APR menacent Mbuji-Mayi.
1er août Signature des accords de Lusaka par le MLC.
7 août / 14 août Première bataille de Kisangani. Premiers combats de Kisangani entre l’APR et l’UPDF provoqués par des affrontements entre les mouvements rebelles RCD-Goma et RCD-Kisangani à propos du contrôle de la ville : 600 morts.
17 août Cessez-le-feu provisoire entre Rwanda et Ouganda ; les troupes rwandaises gardent le contrôle de la ville.
31 août Signature des accords de Lusaka par le RCD.
3 septembre Nomination par Kabila du général Sylvestre Lwetcha, ancien combattant maï-maï, à la tête des FAC ; les principaux commandants maï-maï Padiri, Dunia et Sikatendo sont désignés comme commandants militaires régionaux des FAC dans l’Est.
14 septembre Massacre de Dhendro, région d’Ituri, de villageois Hemas par des milices Lendus.
Septembre « Plan spécial du Zimbabwe ». A Harare, Kabila et ses conseillers zimbabwéens mettent au point le plan suivant, qui a pour conséquence de transformer la guerre conventionnelle dans le centre du pays en guerre irrégulière à l’est : afin de réduire la pression sur les fronts des FAC et de leurs alliés, on augmentera la pression sur le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda en développant la guerre sur leurs frontières, en s’appuyant sur les groupes insurgés.
1er octobre Le RCD-Kisangani s’installe à Bunia (Nord-Est). Arrivée des premiers observateurs de l’ONU.
Octobre / mi- décembre Contre-offensive gouvernementale des FAC contre le MLC autour de Mbandaka, dans la province de l’Equateur : plus 40 attaques lancées et 15 bataillons de 15.000 soldats massés au nord du Congo, selon Bemba ; succès mitigé des troupes gouvernementales et faible progression.
Novembre Encerclement des troupes zimbabwéennes, namibiennes et des FAC par l’APR et le RCD à Ikela (sud de l’Equateur) ; les combats durent jusqu’en 2000.
24 novembre Violents combats autour de Butembo entre miliciens maï-maï et soldats ougandais : les Maï-Maï auraient tué une centaine de soldats ougandais et de rebelles congolais lors de l’assaut d’une base ougandaise.
1er décembre Résolution 1279 du Conseil de sécurité de l’ONU créant la MONUC (Mission des Nations Unies pour le Congo). Ketumile Masire, ancien président du Botswana, est nommé comme « facilitateur » pour le Congo par l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine).
15 décembre Les FAC s’emparent du port de Nkonya, en Equateur.
Bilan fin 1999 : Un pas vers la paix avec la résolution 1279 du Conseil de Sécurité de l’ONU, adoptée le 1er décembre 1999, qui crée la MONUC Mais les combats continuent sur tous les fronts. Les forces gouvernementales essayent de reprendre pied dans le nord-ouest du pays (région de l’Equateur) ; les Zimbabwéens tentent de dégager les forces gouvernementales assiégées à Ikela ; les Ougandais sont confrontés aux Maï-Maï dans le nord-est ; les rwandais tentent de s’approcher de Mbuji-Mayi dans le Kasaï Oriental.
2000
Février Combats autour de Mbandaka entre le MLC et les FAC. Libération de Ikela par troupes gouvernementales. Heurts dans l’Est entre les rebelles et l’APR.
Mars Les Banyamulenge sont assiégés par les Maï-Maï et Interhamwe sur le haut plateau de Fizi-Uvira, dans l’Est.
12 mars Début de l’offensive du Rwanda et du RCD-Goma dans le Kasaï Occidental. les Rwandais s’emparent de Idumbe, Mashala et Demba. 9 mai
22 mai Deuxième bataille de Kisangani. Le conflit oppose les armées rwandaise (APR) et ougandaise (UPDF).
Mai Massacre de Katagota (est) : 300 civils massacrés par le RCD, allié aux Rwandais et aux Burundais.
23 mai Avancée du MLC vers le port fluvial de Mbandaka, sur le front de l’Equateur.
25 mai Contre-offensive des FAC appuyées par l’Angola pour dégager Mbandaka.
29 mai Début de la démilitarisation de Kisangani.
5 juin / 11 juin Troisième bataille de Kisangani entre l’APR et l’UPDF. 900 morts, 2000 blessés. Défaite de l’UPDF et mort des officiers ougandais d’ethnie Hima : Kisangani reste sous le contrôle du RCD et des rwandais ; déploiement de la MONUC entre les deux armées ; retrait des troupes ougandaises vers le nord.
été Offensive des FAC vers le Nord-Katanga : combats autour de Kalemie
27 juillet Combats autour de la ville d’Ikela, en Equateur. Les FAC ont avancé de 200 km vers le nord.
9 août Le MLC refoule les FAC le long de l’Oubangui, près de Libenge, où il stoppe l’offensive de Kabila au nord de l’Equateur.
23 août Kabila annonce la suspension des accords de Lusaka.
Octobre L’APR se retire de Pepa (province du Katanga), en application du plan de désengagement de Kampala. L’ALiR II, l’une des deux divisions de l’Armée de Libération du Rwanda, composée d’anciens interhamwes et de miliciens hutus, épaulée par l’armement des FAC et le Zimbabwe, réoccupe les positions dégagées par les troupes rwandaises. Combats sporadiques à Bunia, dans le Nord-Est, entre Nyamwisi, dissident du RCD-ML, et Wamba di Wamba ; l’Ouganda intervient pour négocier une issue. 2 novembre Le RCD et l’armée rwandaise reprennent la ville de Pepa.
24 novembre Assassinat du commandant Anselme Masasu par les autorités congolaises à Pweto, où il aurait été transféré clandestinement, alors qu’il était détenu ; au même moment exécution au Katanga de 8 coupables de complot contre Kabila, condamnés par la Commission Opérationnelle Militaire (COM).
3 décembre Contre-attaque de l’APR : batailles Pepa et de Pweto. Les troupes de l’APR et du RCD-Goma s’emparent de Pweto, mettant en déroute les forces conjointes des FAC et du Zimbabwe ; des milliers de civils fuient en Zambie. Les troupes gouvernementales sont stoppées dans leur offensive de reconquête vers le lac Tanganiyka. De nombreux prisonniers zimbabwéens sont faits, et 2000 membres d’ALiR doivent se réfugier en Zambie.
6 décembre Signature des accords de désengagement de Harare entre les différents acteurs de la guerre (seul le MLC refuse de signer) permettant à la MONUC de se déployer.
2001
Janvier Affrontements ethniques sanglants entre tribus Hema et Lendu dans la région de Bunia-Nyakunde (province Orientale) : 6000 Hemas fuient en Ouganda.
16 janvier Création du FLC : fusion des factions sous le patronage de l’Ouganda (MLC de Bemba et RCD-ML de Mbusa Nyamwisi et d’Atenyi Tibasiima ainsi que RCD-National de Roger Lumbala) pour créer le Front de Libération du Congo sous la présidence de Jean-Pierre Bemba.
16 février Un accord de paix est signé dans l’Ituri sous l’égide de Bemba entre les deux tribus Hema et Lendu.
mi-mars Escarmouches sur le front sud de l’Equateur entre les troupes de Bemba et les FAC autour de Bolomba.
2 mars Retrait des troupes rwandaises à 200 km au nord de Pweto, vers Pepa : retrait annoncé le 28/02 : ces troupes seront redéployées au Kivu, entre Uvira et Fizi-Baraka, où l’APR craint des infiltrations d’Interhamwe ; mais les troupes du RCD-Goma restent sur place.
Mars Début des infiltrations de combattants hutus sur le front de l’Est, vers les Kivu, près de Shabunda, et le Burundi. Le Zimbabwe réorganise et rééquipe les troupes d’ALiR en vue d’une offensive dans l’est du pays. Accord entre le FLC et des factions maï-maï signé à Butembo, sous l’égide de Bemba ; accord contesté par le général maï-maï Padiri.
Mai Début de l’offensive vers l’Est : opération « Oracle du Seigneur ». Combats au Kivu à Walikale et à Shabunda. Attaques conjointes de l’ALiR I, des FDD et des unités maï-maï. » en direction des frontières burundaises et rwandaises. Contre-offensive rwandaise. Fuite des populations civiles.
Juin Echec de la tentative d’infiltration de l’ALIR I au nord-ouest du Rwanda. L’APR élimine plus de 1500 infiltrés et capture 2000 combattants hutus.
20-24 août Prédialogue de Gaborone : décide du lieu, de la date, de l’ordre du jour et du règlement intérieur du futur « Dialogue Inter Congolais », volet politique des accords de Lusaka.
Septembre Kofi Annan annonce le retrait total de RDC de l’armée namibienne.
mi-septembre Combats entre le MLC et le RCD-National dans la région d’Isiro Mbusa Nyamwisi chasse le MLC des territoires d’Isiro et Aru avec l’appui de l’Ouganda, qui abandonne Bemba pour Nyamwisi. Les territoires sous contrôle du MLC reculent vers l’ouest.
7 septembre / 8 octobre Bataille de Fizi (Sud Kivu). Les troupes burundaises d’occupation (deux bataillons) se retirent de Fizi. Fizi est occupée pendant un mois par les forces conjointes des FAC, du FDD, d’ALiR II et des maï-maï Babembe. Brève occupation de Kindu, capitale du Maniema par les Maï-Maï du général Padiri, pour soulager la pression sur Fizi. Les troupes du RCD-Goma, appuyées par l’aviation burundaise, reprennent la ville le 8 octobre.
17 octobre Reprise de Kalemie par les rebelles du RCD qui poursuivent les fuyards du FDD burundais.
15-21 octobre Echec de la réunion préparatoire d’Addis-Abeba au Dialogue inter congolais.
Novembre Des reliquats d’AliR I basés à Shabunda se déplacent vers le nord (Lubero, Kanyabayonga). Combats avec les maï-maï Simbas ; ils s’établissent dans le no man’s land entre les positions occupées par le RCD et l’armée rwandaise d’une part, les troupes ougandaises de UPDF d’autre part, au nord Kivu. Sur la base militaire de Kamina, Kabila présente au représentant de la MONUC 1580 ex-combattants de l’ALiR désarmés ; ceux-ci se revendiquent membres d’une nouvelle force politique, le FDLR (Front démocratique de libération du Rwanda). Le RCD–Goma et le MLC annoncent leur intention de créer une force militaire conjointe dans les territoires qu’ils contrôlent pour s’occuper de neutraliser les « forces négatives » dans le cadre des Accords de Lusaka, dont la localisation serait à Kindu ; mais le conflit postérieur entre le RCD et le MLC rendra caduc cet accord.
2002
21 février Rébellion Banyamulenge contre le RCD dans les montagnes du Minembwe (hauts plateaux du sud Kivu, à 4 heures d’Uvira) dirigée par le commandant Masunzu, ex-chef de bataillon du RCD ; ralliement de 350 guerriers banyamulenge et de miliciens maï-maï d’origine Bafulero et Babembe ; le général maï-maï Padiri aurait proposé son alliance à Masunzu ; les rebelles sont hostiles à la présence des rwandais en territoire congolais et sont appuyés politiquement par le mouvement des FRF(Forces républicaines fédéralistes).
25 février / 19 avril Ouverture du Dialogue Inter congolais à Sun City en présence des principaux acteurs politiques et militaires du conflit : 360 délégués dont 38 partis de l’opposition politique, des représentants de la société civile et les 3 principaux belligérants (gouvernement, MLC, RCD).
14 / 16 mars La base de Moliro -place forte des FDD- sur le lac Tanganiyka, est occupée par l’APR et le RCD. Le gouvernement de Joseph Kabila, en protestation contre les attaques rwandaises de Moliro et Pepa, au Nord Katanga, menace de se retirer du Dialogue Inter congolais de Sun City.
19 avril Signature de l’accord-cadre de Sun City entre le MLC et le gouvernement congolais « accord politique pour la gestion consensuelle de la transition » : Jean-Pierre Bemba obtient le poste de Premier Ministre du gouvernement de transition, Joseph Kabila est confirmé dans son fauteuil de président. Dénonciation des termes politiques de cet accord par le RCD qui, y voyant un simple partage du pouvoir, se retire ; le RCD-ML signe l’accord.
25 avril Le RCD, une partie de l’opposition politique congolaise, dont l’UDPS, et des forces vives créent une Alliance pour la Sauvegarde du dialogue Inter congolais (ADS), en réponse à l’accord signé à Sun City entre le MLC et le gouvernement.
26 avril Contacts entre le RCD et les représentants de la MONUC à Kindu, en vue du déploiement dans cette ville des unités chargées du programme de "démilitarisation" (DDR).
10 mai Réunion de Cape Town, où les parties congolaises n’ayant pas signé l’accord de Sun City proposent leur alternative sur le Dialogue inter congolais.
14 mai Mutinerie à Kisangani de certains éléments de la 7ème brigade de l’armée et de la police du RCD. Cette rébellion est réprimée dans le sang par les militaires loyaux au RCD. Les mutins se replient vers Banalia et les territoires contrôlés par le MLC. Les ONG de Kisangani dénoncent des représailles sur les civils : selon le rapporteur spécial des Nations Unies, le bilan des victimes s’élève à plus de cent morts, et de nombreuses exécutions extrajudiciaires ont eu lieu.
20 mai Un communiqué du RCD accuse une fraction du RCD, le « RCD Original », scission du mouvement apparue le 24 février 2002, à la veille des accords de Sun City, d’être responsable de la mutinerie du 14 mai. Affrontements entre maï-maï et miliciens interhamwe signalés à Kindu ; tension dans les territoires de Mwenga et Shabunda Désertion de 51 policiers du RCD à Pweto.
1er juin Les autorités du RCD présentent à la presse deux maï-maï considérés comme les auteurs de l’attentat à la grenade du 14 mars 2002 à Goma et accusent de complicité des fonctionnaires européens de la MONUC ; démêlés avec les associations de défense des droits de l’homme, qui avaient protesté contre ces arrestations. Les rapports entre la MONUC et le RCD se détériorent, et le responsable de la section droits de l’Homme de la MONUC à Kisangani se voit retirer son accréditation
13 juin Adolphe Onusumba annonce la prochaine remise à l’Unicef d’enfants soldats se trouvant parmi les 1200 maï-maï détenus au camp de rééducation de Luvungi, originaires de la région de Fizi et Uvira, dans le Sud Kivu.
mi-juin Les combattants maï-maï chassent la police et l’administration du RCD de la ville de Pweto, au nord Katanga.
14 juin A Bunia, dans la région sous contrôle du RCD-ML, les leaders ethniques Hema, qui étaient opposés à la mise en œuvre des accords de Sun City, sont déportés par les militaires ougandais vers Kinshasa. Concentration de troupes des FAC dans l’Ituri, où les violences, selon le RCD, auraient fait 1500 morts en quelques jours. Le RCD et le gouvernement s’accusent mutuellement de préparer une reprise des hostilités dans le nord Kivu.
21 juin Mouvements de troupes des FAC vers les hauts-plateaux d’Itombwe, dans le Sud-Kivu, en appui à la rébellion des Banyamulenge du commandant Masunzu. Combats dans les localités proches de Minembwe. Les troupes de l’ANC et de l’APR repoussent une tentative de s’emparer de la localité de Kilembwe ; à Goma, une délégation de la direction banyamulenge du RCD tente d’obtenir la désolidarisation de la population d’avec les mutins.
22 juin Le porte-parole du RCD, le professeur Kin Kiey Mulumba, est suspendu de ses fonctions par la direction du RCD en raison de ses prises de position publiques hostiles à la poursuite de la guerre prônée par la direction de son parti après Sun City.
26 juin / 15 juillet Tournée du président Etienne Tshisekedi au titre de l’Association pour la sauvegarde du Dialogue inter congolais (ASD) dans les territoires contrôlés par le RCD ; le 26 juin il dénonce à Goma, aux côtés de représentants du DPIN (Dynamique pour la paix et la transition neutre) de Katebe Katoto et du MLP (Mouvement lumumbiste pour le progrès) l’accord conclu à Sun City entre le gouvernement et le MLC.
1er juillet Communiqué du RCD annonçant la reprise du contrôle de Pweto par les troupes du RCD.
27 juillet Le professeur Kin Kiey Mulumba, ancien porte-parole du RCD démis de ses fonctions en juin, annonce à Bruxelles la création d’un nouveau parti, le RCD-Congo.
30 juillet Signature de l’accord de Pretoria entre les gouvernements du Rwanda et de RDC : les deux parties s’engagent à soutenir les efforts de la MONUC pour désarmer les ex-FAR et Interhamwe en territoire congolais, et le Rwanda à retirer ses troupes du territoire congolais, en échange d’une sécurisation de ses frontières. La direction du RCD, réunie à Goma, envisage, face aux multiples scissions internes et à l’effritement de ses appuis internationaux, une éventuelle reconversion en mouvement politique.
6 août Reprise à Bunia des affrontements armés entre les forces du RCD-ML de Mbusa Nyamwisi et celles du FRP de Thomas Lubanga soutenues par l’Ouganda qui ont fait près de 100 morts ; affrontements à Isiro entre les troupes du RCD-ML et celles du RDC-National de Roger Lumbala, soutenu par le MLC.
14 août Le Zimbabwe et l’Ouganda annoncent le retrait de leurs troupes de la RDC. Signature de l’accord de Luanda sur le retrait des troupes ougandaises de RDC.
17 août La direction du RCD permute ses commandants de brigade afin de se préparer à l’éventualité d’une attaque des troupes gouvernementales consécutive au retrait des troupes rwandaises.
début septembre Rapatriement forcé par le Rwanda de 6000 réfugiés congolais vers les territoires contrôlés par le RCD. Début de 3 semaines de combats continus à Kindu : importantes opérations militaires des troupes du RCD contre les milices maï-maï, installées dans les environs de la ville et autour de l’ancien aéroport de Katako.
12 septembre Ralliement au RCD de l’ancien ambassadeur en Suisse Christian Kambinga
18-19 septembre Début du retrait des troupes rwandaises de RDC ; les soldats rwandais abandonnent les places stratégiques de Kindu (province de Maniema), et les villes du nord Katanga (Kalemie, Kabalo, Kongolo et Nyunzu).
23 septembre Le représentant de la MONUC est autorisé de nouveau à accéder au territoire contrôlé par le RCD.
24 septembre Fermeture du QG des troupes angolaises de Mbandaka, namibiennes et zimbabwéennes, qui ont terminé leur retrait de la province de l’Equateur.

République démocratique du Congo : l’identité rwandaise en RDC.
L’identité rwandaise en RDC
Bibliographie
-->
République démocratique du Congo : la situation des partis politiques en zone gouvernementale.
Situation des partis politiques en zone gouvernementale
Liste des 26 partis et formations de l’opposition politique
Bibliographie
République démocratique du Congo : les zones de rébellion.
Les zones de rébellion
Chronologie
Bibliographie
-->
République démocratique du Congo : la garde civile dans l’ex-Zaïre.
La Garde civile au Zaïre
Abatabizi bicwa no kutabimenya.
Nikozitambirwa.

Les Banyarwanda au Congo

L’identité rwandaise en République démocratique du Congo.
Parution : 2/10/2003 Auteur : Centre d’information géopolitique

Depuis la prise de pouvoir de Laurent Désiré Kabila et la chasse aux Tutsis encouragée par ce dernier et intervenue en août 1998 se pose avec acuité la question de l’identification des « Rwandais en RDC ».
D’un point de vue historique, il est nécessaire de déterminer quel a été le déroulement des vagues d’immigrations des Rwandais chez le grand voisin congolais. Ces dernières ont, en effet, engendré de nombreux conflits dans la région du Kivu puis deux guerres civiles qui ont vu la chute de Mobutu et la mise en place d’une zone de rébellion en rupture avec le nouveau régime de Kinshasa.
Ces conflits successifs ont démontré la difficulté, voire le refus de reconnaître un statut juridique aux populations d’origine rwandaise au Congo, populations qu’il y a lieu de distinguer des Rwandais arrivés massivement après la guerre civile au Rwanda et le génocide des Tutsis en 1994.
Après avoir déterminé quelles sont les populations identifiables et identifiées comme étant d’origine rwandaise, il faudra exposer quelle est leur situation à Kinshasa et en zone de rébellion.
I. L’immigration des « Rwandais » dans la région du Kivu avant 1994
L’immigration des « Rwandais » dans la région du Kivu voisin s’est faite de manière progressive jusqu’en 1994 : elle est intimement liée à l’histoire du Rwanda et à l’influence du colon belge.
1/ Situation ethnique et politique du Rwanda au début du siècle
Le Rwanda était initialement un royaume où cohabitaient des populations distinctes par leurs fonctions et non par leurs ethnies.
Par Banyarwanda [1] , on entend l’ensemble des Tutsis, Hutu et les Twas qui parlent le Kinyarwanda et qui vivaient initialement au royaume du Rwanda. Mis au banc de la société aussi bien par les Tutsis que par les Hutus, les Twas, qui représentaient 1 à 2% de la population de souches pygmées, ont toujours exécuté des taches subalternes. Il y avait une classe minoritaire et dominante d’éleveurs de vaches appelée Tutsis, originaire de la corne de l’Afrique, à laquelle était soumise la classe majoritaire d’agriculteurs appelée Hutus, d’origine bantoue, représentant environ 85 à 90 % de la population. Ces populations parlaient la même langue, le Kinyarwanda, occupaient les mêmes terres et avaient les mêmes références culturelles. Il s’agissait d’un véritable système féodal qui voulait que la classe des Hutus laisse ses terres à disposition de la classe des Tutsis qui pouvaient ainsi faire paître leurs vaches. Il existait des relations de clientélisme entre les deux classes, les Tutsis prêtant leurs vaches aux Hutus qui eux même devaient prêter leurs terres en échange. Dans ce système féodal, la vache représentait l’attribut de la richesse. Les plus riches des Tutsis avaient les troupeaux les plus importants.
La totalité de l’aristocratie était tutsie mais la majorité des Tutsis n’avaient pas de position sociale beaucoup plus élevée que les Hutus. Au sommet de cette organisation sociale se trouvait le roi Mwami doté de pouvoirs divins et incarnant l’unité nationale. Ce système connaissait une certaine souplesse. Le roi s’entourait de chef de guerre tutsis mais aussi de conseillers hutus qui géraient la répartition de la terre. Il existait, en outre, des royaumes dans le nord du Rwanda qui relevaient des Hutus uniquement.
Les Tutsis ont d’abord été considérés par les Européens comme une « élite naturelle » de par la différence morphologique puisqu’ils se caractérisent par une grande taille, une minceur et des traits fins. Certains les considèrent comme une population nilotique (issue de la vallée du Nil) qui s’oppose aux caractéristiques des Hutus assimilés aux Bantous qui sont de petite taille, plus trapus et qui ont les traits moins réguliers. Ce n’est que sous la domination coloniale des Belges que ce clivage social s’est accentué pour être appréhendé comme un clivage ethnique.
Le fait que les Tutsis soient un peuple de pasteurs a toujours posé le problème de l’occupation des terres par les troupeaux de vaches qui ont besoin d’un espace étendu. Et, progressivement, le Rwanda, royaume exigu, connaît une surpopulation, laquelle pose inéluctablement le problème de l‘occupation des terres.
2/ Les populations rwandaises relevant du territoire congolais après la convention germano-belge de 1910
A l’époque du tracé des frontières entre les puissances européennes à Berlin en 1885, le concept même de pays en Afrique apparaît comme hors de propos. La convention germano-belge intervenue en 1910 a restitué une partie des territoires du Rwanda et de l’Urundi à l’Allemagne. Cette convention a cependant laissé des populations d’origine tutsie de l’autre côté de la frontière congolaise. Une partie des populations tutsies du Rwanda précolonial va être considérée comme relevant des terres congolaises et de l’administration coloniale belge.
A ce moment, les Tutsis vivant au Congo occupaient deux régions distinctes qui sont au Nord-Kivu : le Masisi et le Rutshuru dont les territoires relevaient du roi du Rwanda avant la conférence de Berlin. On parle alors de « banyarwanda d’origine tutsie vivant au Congo ». Dans ces territoires on retrouve des Tutsis dans le canton de Bwisha dans la zone administrative de Rutshuru et dans celui du Gihari dans la zone du Masisi. Il faut ajouter en outre, les populations banyarwandas des terres de Djomba, Kanrusi et l’île d’Idjwi relevant elles aussi de l’administration coloniale belge.
De ce groupe de Tutsis vivant au Congo, il faut distinguer les éleveurs tutsis installés sur les hauts plateaux de l’Itombwe pour leur élevage, appelés de manière spécifique les banyamulenge. Ces tutsis congolais ont tiré leurs noms de l’occupation de la colline de Mulenge, à côté de laquelle ils s’étaient installés. Cette appellation s’est popularisée à partir de 1967 afin de distinguer cette population des autres Tutsis congolais. A partir de 1998, ce terme est utilisé de manière indifférente pour parler de tutsis congolais.
Ces populations rwandophones ont vécu en bonne intelligence avec les autochtones qui leur ont laissé l’opportunité d’occuper leurs terres afin d’étendre leurs troupeaux. Cependant, elles ont gardé des caractéristiques marquées comme une endogamie forte et un certain repli communautaire qui n’a pas permis une réelle intégration de ses populations.
3/ Le transfert des populations rwandaises au Congo belge
Les Belges qui héritent du Rwanda et de l’Urundi après la Première guerre mondiale, constatent une densité de population élevée au Rwanda, déjà considéré comme surpeuplé. Ils y voient aussi un réservoir de main d’oeuvre pour la colonie congolaise voisine qui est en train de se développer et qui est nettement moins peuplée. En 1937, les autorités coloniales du Rwanda et les autorités de la province du Kivu signent un accord afin de mettre en place, d’une part, la migration des Banyarwanda vers le Kivu et, d’autre part, de créer et de peupler la circonscription du Masisi.
Il y aura ainsi un transfert de près de 200 000 personnes sous la période coloniale, essentiellement des Hutus encouragés par les Belges pour cultiver les terres. Dans le Rutshuru, par exemple, les colons belges ont encouragé exclusivement la culture de la terre par les Hutus, de peur de voir les terres occupées par les vaches des pasteurs tutsis. Pour accentuer la différence avec le Rwanda voisin, ce sont des chefs hutus qui ont été nommés à la tête des colonies comme à Bishwa en 1923.
La présence des populations immigrant du Rwanda voisin sous l’impulsion du colon, ne posait pas encore de graves problèmes d’occupation de terres. Il existait, en effet, un véritable contrat foncier qui facilitait l’accès à la terre des immigrants dans un rapport de clientélisme par rapport aux propriétaires fonciers autochtones. Le Kivu, par son territoire étendu, avait toujours été, en outre, une terre d’immigration pour ces populations ; immigration facilitée par la porosité des frontières.
De 1953 à 1955, le peuplement s’accroît pour venir ainsi s’étendre aux terres hunde, englobant la région du Washali-Makoto : 150 000 hectares sont pour ainsi dire colonisés par les Banyarwanda. Dès leur arrivée, leur assimilation par les populations locales s’avère difficiles. En effet, les Banyarwanda bénéficient de structures administratives autonomes, ce qui les affranchit de l’autorité des chefs traditionnels locaux, lesquels acceptent mal cette indépendance. De plus, les populations locales y voient une occupation de leurs terres.
Les colons belges ont aussi recruté massivement de la main d’œuvre, dont 80 000 Banyarwandas provenant aussi du Burundi, afin de développer l’agriculture et l’exploitation minière au Katanga, au Maniema et dans le reste du Kivu. Des bureaux de recrutements ont répartis cette main d’œuvre en l’orientant vers la société des Mines d’or de Kilo-Moto en Ituri, la Compagnie minière des grands lacs africains, le Comité national du Kivu et l’Union Minière du Haut Katanga. La région du Sud Kivu qui connaissait déjà la présence des Banyamulenge n’a pas intéressée les colons belges et n’a pas connu d’importants transferts de population.
4/ L’immigration politique des Tutsis après les massacres de 1959
Les colons belges vont accentuer les antagonismes entre les Tutsis et les Hutus, dès leurs reprises de la colonie. Il faut souligner qu’initialement, les colons ont renforcé la sphère de pouvoirs des premiers au détriment des seconds. Lorsque l’aristocratie tutsie revendique l’indépendance du Rwanda, les belges décident de modifier leur politique coloniale. Ces derniers, qui ne s’étaient jamais élevés contre la domination des Tutsis sur les Hutus, bien au contraire, vont, en effet, changer d’allié politique. Le choix tactique des colons consiste alors à s’appuyer sur la majorité hutue afin de retarder l’indépendance de la colonie. Les Belges vont diaboliser, d’une part, les Tutsis en les accusant d’être les oppresseurs. Ils vont expliquer aux Hutus, d’autre part, qu’ils sont restés trop longtemps une masse exploitée par les seigneurs tutsis.
A travers le système éducatif, les colons belges, mais aussi l’église, dont la place était prédominante, n’ont cessé d’accentuer ses différences sociales et de les radicaliser. Leurs influences ont été telles que les populations ont considéré lesdites différences comme une réalité, oubliant par là même les nombreuses ressemblances culturelles et l’utilisation commune de la langue du Kinyarwanda.
En 1957, le premier manifeste hutu est publié. En novembre 1959, c’est « la toussaint Rwandaise » qui voit les premiers massacres des Tutsis par les Hutus qui s’approprient les biens de leurs anciens seigneurs. Il y aura 20 000 morts entre 1959 et 1963.
Les Tutsis fuient vers les pays voisins dont l’Ouganda (35 000 personnes), le Burundi (35 000 à 42 000 personnes), la Tanzanie (10 000 personnes) et au Zaïre, au Nord Kivu (60 000 personnes). Après ces massacres, une véritable diaspora tutsie s’installe dans les pays voisins. Une partie de celle-ci réfugiée, en Ouganda, ne renoncera pas à ses revendications sur le Rwanda et souhaitera ardemment la chute du régime autoritaire hutu d’Habyarimana, arrivé au pouvoir à Kigali en 1973. Elle sera rejointe par la suite par certains hutus du sud du Rwanda s’estimant lésés par le régime autoritaire d’Habyarimana qui, lui, vient du nord du pays.
5/ La question de la nationalité des Banyarwanda et des Banyamulenge sous le régime du Président Mobutu
Comme il a été dit précédemment, le Kivu a été dès la deuxième parie du 19ème siècle, une terre d’immigration et d’implantation durable d’une partie des populations banyarwanda. A l’indépendance du Congo, les populations banyarwanda administrées par les Colons belges, en application de la Convention germano-belge de 1910, obtiennent la nationalité congolaise puis zaïroise. Le président Mobutu, dans le cadre de sa politique de la Zaïrianisation, décide, par ordonnance présidentielle en date du 26 mars 1971, de l’octroi collectif de la nationalité zaïroise aux populations rwandaises qui vivent au Kivu. Cette décision est prise sous l’influence de chef de cabinet de Mobutu, Barthélemy Bisengimana Rwema d’origine banyarwanda et ancien président des étudiants rwandais à l’Université Lovanium à Kinshasa. Cette disposition est confirmée par la loi n°72-002 du 5 janvier 1972, relative à la nationalité zaïroise, qui dispose à titre introductif dans son article 2 que « le Zaïrois ne peut posséder qu’une seule nationalité ». Cette loi dispose, en outre, dans son article 15, que les « personnes originaires de Rwanda-Urundi qui étaient établies dans la province du Kivu avant le premier janvier 1950 et qui ont continué à résider depuis lors dans la République du Zaïre jusqu’à l’entrée en vigueur de la présente loi ont acquis la nationalité zaïroise à la date du 30 juin 1960 » [2].
Le caractère collectif de l’octroi de ladite nationalité zaïroise est apparu, pour certains, comme un non-sens juridique qui a jeté le discrédit sur cette disposition. Il était difficile d’identifier les populations visées par la loi en raison, d’une part, de l’immigration clandestine rwandaise, facilitée par la perméabilité des frontières et, d’autre part, de la faiblesse de l’administration zaïroise qui a permis à beaucoup d’obtenir des papiers d’identité grâce à la corruption endémique du régime de Mobutu.
Les Rwandais installés plus récemment ou ceux ayant fui les massacres ethniques de 1959, n’ont pas toujours souhaité renoncer à leur nationalité d’origine dans l’optique d’un retour nostalgique au Rwanda et ont cumulé deux nationalités, sans chercher à respecter les dispositions législatives relatives à l’octroi de la nationalité zaïroise, achetant souvent leur carte d’identité.
La fin des années 70 au Zaïre est marquée par une vision de plus en plus restrictive de la notion de l’autochtonie, laquelle se traduit par une concentration croissante des pouvoirs entre les mains de la tribu du président Mobutu. Les partisans du parti unique du président choisissent en 1981, lors de l’assemblée nationale du Mouvement populaire pour la révolution, d’interdire l’octroi de la nationalité pour les personnes natives des tribus qui ont immigré au Zaïre. En 1981, Mobutu adopte donc une nouvelle loi sur la nationalité zaïroise qui est suivie d’une ordonnance d’application n° 82-061 en date du 15 mai 1982 qui énonce dans son article 20 que « sont nuls et non avenus les certificats de nationalité congolaise ou tout autre document d’identité délivrés en application de l’article 15 de la loi n°72-002 du 5 janvier 1972 sur la nationalité zaïroise ». Cette disposition a pour objectif et pour conséquence le retrait collectif de la nationalité aux populations originaires du Rwanda vivant au Zaïre. Pour certains, la nationalité zaïroise va devenir impossible à prouver et leur nationalité va donc devenir douteuse voire inexistante.
Lors de la Conférence Nationale Souveraine de 1991, la question de la représentation des Banyarwandas et des Banyamulenges dans les instances politiques zaïroises va ressurgir et va être un point de discorde important. La nationalité de ces derniers étant sans cesse mise en doute, ils n’ont pas pu participer à cette Conférence. Plus tard, le gouverneur du Sud-Kivu, déclarera en septembre 1996, que les Banyamulenge doivent quitter le territoire sous peine d’être internés ou d’être exterminés.
II. les conséquences migratoires de la guerre civile rwandaise au Zaïre
1/ Le problème latent de la diaspora tutsie en Ouganda
Une partie des enfants, fils de la diaspora tutsie réfugiée en Ouganda depuis les premiers massacres de 1959 a intégré les rangs de la rébellion ougandaise de Museveni, devenue ensuite l’armée régulière ougandaise après l’accession de celui-ci au pouvoir. On retrouve en 1985 dans ses rangs, le futur président rwandais d’origine tutsie, Paul Kagame, issu du camp de réfugiés de Tutsis rwandais de Toro en Ouganda.
Avec l’arrivée au pouvoir de Museveni et l’appui de la diaspora tutsie rwandaise dans sa rébellion, des Tutsis rwandais affluent en Ouganda en espérant se voir reconnaître une citoyenneté à part entière après avoir payé du prix du sang la victoire de Museveni. Ceux-ci bénéficient un certain temps de la protection du dirigeant ougandais. Se mettent ainsi en place des réseaux d’affaires qui s’étendent jusqu’au Kivu, Kinshasa et la Tanzanie. Cette réussite provoque un certain malaise chez les Ougandais qui vont souhaiter le départ de ces populations. A la fin des années 80, la Banque mondiale exige une restructuration de l’armée ougandaise qui doit se traduire par une réduction drastique de ses effectifs. Le président ougandais est contraint de renvoyer de son armée les Tutsis rwandais, qui pourtant lui ont été indispensables à sa victoire militaire et à son accession au pouvoir.
La question de la minorité des Tutsis se pose à nouveau et ces derniers, tout comme ceux qui vivent en Tanzanie, souhaitent ardemment retourner dans leur pays puisqu’ils sont exclus du droit à une nationalité dans les pays où ils se sont réfugiés. Le Président hutu Habyarimana qui dirige le Rwanda rejette l’existence de cette diaspora en invoquant un pays trop exigu en cas de retour de cette population persécutée depuis 1959. Ladite diaspora, très politisée et bien entraînée militairement fait le choix des armes autour du Front patriotique Rwandais (FPR) avec à sa tête Paul Kagame, encouragé par le dirigeant ougandais. Museveni voit là un moyen de régler le problème de la diaspora tutsie qu’il parvient ainsi à occuper et à motiver pour la reconquête du pays natal. Paul Kagame suit un programme d’entraînement aux Etats-Unis en 1990 et rentre en urgence en Ouganda après l’échec de l’incursion du FPR au Rwanda en 1990. La branche armée du FPR, l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) a été, à ce moment, confrontée à une armée rwandaise, forte de 15 000 hommes et aidée par un contingent envoyé par Mobutu et par des militaires français dépêchés par François Mitterrand, appelé au secours par le président rwandais.
L’échec de cette incursion oblige Kagame a changé de tactique. Il décide de former une véritable guérilla, près des volcans de la Virunga, afin de reconquérir le Rwanda. Le FPR prépare la reconquête du Rwanda à partir de la région des volcans. L’Ouganda de Museveni apportera en outre un soutien logistique et matériel au FPR. Cette guérilla va mener des incursions de plus en plus violentes dans le Rwanda qui va s’accompagner d’une répression sanglante des populations tutsies encore sur place par le régime hutu.
2/ Le début des tensions au Kivu en 1993
Le repli du FPR et les incursions de sa guérilla deviennent les vecteurs du discours sécuritaire et haineux des tenants du « Hutu power » qui voient dans la minorité tutsie l’ennemi intérieur qu’il convient d’exterminer dans la droite ligne de la révolution sociale de 1959. Révolution qui a vu les premiers massacres de la minorité tutsie par la majorité hutue, laquelle souhaitait récupérer les terres dont elle avait été, soi-disant, toujours spoliée. Les radicaux hutus, appelés Akazu, proches du Président Habyarimana, et originaires du nord du pays ne souhaitent pas que le dialogue s’engage dans le cadre du multipartisme, récemment instauré, avec le FPR et les Hutus modérés. Ils sont prêts à tout pour que le pouvoir reste entre les mains du clan et propagent un discours haineux à travers des médias, comme la radio des Mille collines.
La montée des tensions ethniques au Rwanda et l’échec des accords de paix d’Arusha de 1993, ont quant à eux des répercussions au Zaïre voisin. La tension augmente dans le Kivu où les populations d’origine rwandaise deviennent des boucs émissaires. Elles ont revendiqué le droit à la nationalité et à l’éligibilité mais ont été exclues du processus démocratique de la Conférence nationale souveraine débutée en 1991. Leurs revendications sont mal vécues par les autres tribus dont elles deviennent objet de jalousie en raison de leur réussite économique, dans la restauration ou l’exploitation de grandes fermes. La répartition foncière avec les autochtones pose aussi des problèmes accrus dans une région très densément peuplée. L’octroi éventuel de la nationalité auxdites populations et l’exercice du droit de vote qui en découlerait fait aussi peur aux autochtones.
Les violences ethniques entre autochtones et Banyarwanda s’aggravent dans un climat régional très tendu en raison des infiltrations de l’APR de Kagame en terre rwandaise et les tensions au Burundi. Il y a ainsi de nombreuses attaques dans le Nord Kivu des populations Banyarwanda par les Nyanga et les Hunde. Ces attaques sont tolérées par les autorités locales et les Forces armées zaïroises qui restent impassibles. En réalité, Mobutu, à la fin de son règne, choisit de laisser la situation se dégrader en laissant faire ces massacres. Il espère ainsi pouvoir représenter aux yeux de la population le dernier recours pour sauver l’unité nationale. De mars à août 1993, le conflit fait de 6000 à 7000 morts dans la zone de Walikale et de Masisi ainsi que dans les zones de Rutshuru et la collectivité de Bwito. A ce moment, il existe une véritable cohésion de la population des Banyarwanda dans le Kivu contre les multiples agressions dont ils sont victimes par les tribus locales des Hunde, Nande et des Nyasas. Il n’y a pas encore lieu de faire de distinction entre les origines tutsis ou hutu desdites populations. Cette unité est totalement remise en cause par le discours ethnique importé du Rwanda.
3/ Le génocide rwandais et l’afflux des Hutus au Zaïre
En 1994, les Tutsis Rwandais sont victimes d’un génocide de la part des Hutus et de leurs chefs. Le génocide commence le 6 avril 1994, jour de la disparition du Président rwandais Habyarimana et son homologue Burundais. Les massacres visent les Tutsis et les Hutus modérés. En un peu plus de trois mois, entre huit cent mille et un million de personnes, essentiellement des Tutsis, vont périr dans les massacres.
Corrélativement à ces massacres, l’armée très structurée et bien armée du FPR reconquiert le pays en raison de la déliquescence des Forces armées rwandaises (FAR) qui se sont avérées peu disciplinées et peu motivées au combat. Certains de ses bataillons se sont surtout investis dans le génocide oubliant qu’il fallait défendre le territoire. En juillet 1994, le FPR prend le pouvoir à Kigali et une partie de la diaspora tutsie retourne au Rwanda.
Cette reconquête du pays par la minorité tutsie exilée a pour principale conséquence de faire fuir la population hutue (deux millions de personnes déplacées) dans les pays voisins. Dans sa reconquête, l’APR n’a pas hésité à agir brutalement, souhaitant pourchasser les génocidaires ou ceux qui les ont aidé. Un couloir humanitaire est mis en place sous l’égide des Nations Unies et de la France : l’« Opération turquoise ». L’arrivée de près d’un million de Hutus dans le Nord Kivu est très mal vécue dans cette région déjà surpeuplée d’autant qu’une partie des réfugiés dont les miliciens hutus et les Interhamwe (groupe de miliciens hutus extrémistes qui ont commis la plus grande partie du génocide au Rwanda) s’installent au Kivu dans une optique de réarmement et de retour militaire au Rwanda. Ils veulent créer un « Hutuland » en territoire zaïrois afin de reconquérir le Rwanda. Cette période est caractérisée par l’arrivée massive de réfugiés hutus qui a pour conséquence le déplacement et l’expulsion de leurs terres des autochtones et des Banyarwanda tutsis.
Les populations locales du Nord Kivu se sentent en minorité dans leur propre région qui devient une région toujours plus dangereuse en raison des conditions de vie dans les camps de réfugiés surpeuplés, des vols, pillages et des multiples agressions des populations locales et de l’embrigadement de force pratiqué par les extrémistes hutus.
4/ L’exacerbation des tensions au Kivu entre 1994 et 1996.
Entre l’été 1994 et l’été 1996, des conflits opposent plusieurs belligérants dans le Kivu. Les Hutus zaïrois se sont associés à leurs cousins Hutus rwandais. Les Hutus rwandais récemment arrivés sur le sol zaïrois refusent de rester dans les camps de Goma et se rapprochent des Banyarwanda hutus du Masisisi qui sont installés depuis des années et regroupés dans la mutuelle agricole des Virunga.
Quant aux Tutsis zaïrois, victimes de persécutions des Hutus, ils ont craint de devenir les potentielles victimes d’un nouveau génocide. Ils ont donc rallié leurs cousins rwandais pour défendre leur propre sécurité, devenant pour longtemps aux yeux des Zaïrois les émissaires de Kigali. Paul Kagame, sur les conseils de son ami Museveni, Président de l’Ouganda, profite de cette conjoncture pour recruter des jeunes Tutsis zaïrois, ainsi que des orphelins du génocide, dans l’Armée patriotique rwandaise. Ceux-ci vont être dénommés « les soldats sans frontières », formés pour éviter un nouveau génocide. Ces bataillons sont rompus aux techniques de la guérilla, comme les techniques d’infiltration en milieu ennemi et maîtrisent très bien les outils de communication grâce au soutien de l’armée américaine dans leur formation.
Les tribus locales composées des Nande, Nyanga, Tembo et Hunde aussi menacées par la domination rwandaise puis plus récemment par la présence massive des Hutus se regroupent en milice. On parle alors des milices « Maï Maï ».
Les Forces armées zaïroises en décomposition tolèrent quant à elles, les exactions commises par les Hutus. Il y a pendant cette période environ 30 000 morts selon Gérard Prunier. Pour d’autres, comme les organisations locales de défense des droits de l’homme, il y a eu près de 70 000 morts et plus de 250 000 déplacés. Le pouvoir en place à Kinshasa tolère ces exactions qui règlent en partie le sort des Tutsis du Nord Kivu suspectés d’être proches de Kigali. Près de 15 000 Banyarwanda d’origine tutsie fuient les massacres et se réfugient au Rwanda afin d’être protégés par le nouveau régime à dominance tutsie du FPR. Les Banyamulenge du Sud Kivu sont quant à eux assimilés par les populations locales aux réfugiés rwandais et sont dès lors ostracisés. En mai 1996, de nombreux Banyamulenge sont tués dans la région du Masisi.
La présence des Interhamwe au Kivu, génératrice d’une insécurité grandissante, a placé cette région swahiliphone et très éloignée de Kinshasa, au cœur de la tourmente du conflit des Grands Lacs. Le discours des extrémistes hutus a en effet gangrené le Kivu et fait exploser la cohésion de la communauté Banyarwanda selon les distinctions ethniques de la guerre civile rwandaise. Les rapprochements intervenus entre 1994 et 1996 sont devenus des alliances propres à une véritable logique de guerre.
5 / La chute de Mobutu et l’arrivée de l’AFDL au pouvoir
La violence des troubles incessants au Kivu motive les voisins ougandais, rwandais et burundais à voir se pacifier la région sous l’influence des Etats-Unis.
Paul Kagame, cherche à éviter un nouveau génocide mais estime aussi devoir traquer les génocidaires là où ils se trouvent, revendiquant un véritable droit de poursuite. Cette volonté de Kigali de traquer les génocidaires se traduit par la commission d’exactions commises sur les populations hutues réfugiées au Zaïre. On estime à environ 200 000 le nombre de victimes hutus des incursions de l’APR afin de sécuriser le Kivu et de le nettoyer de la présence des génocidaires.
C’est dans ce climat de grande instabilité qu’une coalition se met en place en octobre 1996 au Kivu. Il s’agit de l’Alliance des Forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) qui va faire tomber le régime dictatorial du Maréchal Mobutu. Cette alliance tend à promouvoir les intérêts des populations d’origine tutsies et, plus largement, ceux de l’Est du pays. Elle est composée de quatre mouvements distincts :
- le Parti de la Révolution Populaire (PRP) fondé en 1967 et dirigé par L.D. Kabila, lumumbiste convaincu qui a été le chef d’une zone, subsistant selon des principes marxistes-léninistes dans une certaine autosuffisance, peuplée de Babembe et de Banyamulenge dans le Nord Katanga et le Sud Kivu. - l’Alliance Démocratique du Peuple (ADP) a été fondée en 1995 et rassemble des Banyamulenge et des Banyarwanda tutsis du Nord Kivu ; elle est présidée par Déogratias Bugera, un tutsi du Masasi. - le Mouvement Révolutionnaire pour la Libération du Zaïre (MRLZ) dirigé par Anselme Masasu, ancien colonel de l’Armée patriotique rwandaise, devenu membre des services de sécurité du Président ougandais Museveni, originaire d’Uvira, d’ethnie Bashi et dont le mère est une Tutsie rwandaise. - le Conseil National de Résistance pour la Démocratie (CNRD) fondé en 1993, regroupe des lumumbistes replié en Ouganda, présidé par André Kiase Ngandu, originaire du Kassaï et d’ethnie Luba.
L.D. Kabila parvient à conquérir le territoire zaïrois en sept mois grâce à l’appui de ses voisins ougandais et rwandais qui encadrent son armée, formée pour beaucoup de jeunes « Kadogos » de l’Est du pays. Kadogo signifie « petit » en swahili et désigne les enfants soldats de l’armée de Kabila qui ont été pour beaucoup recrutés par le commandant Masasu.
Le 17 mai 1997, Kabila s’autoproclame Président de la République démocratique du Congo. Il se présente comme le libérateur du pays et le garant de l’unité nationale se référant aux idéologies de son mentor décédé, le nationaliste Lumumba. L’ancien rebelle s’est appuyé en grande partie sur les populations de l’Est pour conquérir le pays. Pour celles-ci, son arrivée est un espoir de voir se sécuriser leur région et de régler, enfin, la question litigieuse de la nationalité des Banyarwanda depuis longtemps revendiquée.
III. L’impossible pacification du Kivu ou la déliquescence de la République démocratique du Congo
1/ Le début de la rébellion
L’AFDL apparaît vite incompétente et déchirée par des ambitions personnelles dans l’exercice du pouvoir. L’importance des Tutsis dans l’entourage de Kabila déplaît à ses frères katangais qui encouragent leurs évictions. Deux des chefs historiques de l’alliance sont ainsi renvoyés par le président Kabila : Déogratias Bugera est écarté du pouvoir en septembre 1997 et le Commandant Masasu est arrêté le 25 novembre 1997 pour une implication supposée dans un trafic de drogue.
L’armée congolaise, dirigée par James Kabare, est aussi rapidement divisée par les rivalités ethniques. Ce Rwandais anglophone issu de la diaspora ougandaise est un ancien officier de l’armée ougandaise qui a ensuite rejoint l’APR. Il est, à la fois, chef d’état major de l’AFDL et l’un des proches du président rwandais, Kagame. Il se trouve à la tête d’une armée désorganisée, qui ne connaît pas de cohérence linguistique (opposition entre le swahili et le lingala) ou ethnique (Katangais, Kassaïens et Tutsis). James Kabare, émissaire de Kigali, est renvoyé de son poste le 11 juillet 1998 par Kabila, qui congédie ensuite les cadres tutsis de l’armée et les remplace par des Katangais. Il est remplacé par Célestin Kifwa, civil katangais, beau-frère du Président autoproclamé. Dans le courant du mois de juillet 1998 la diaspora tutsie informée du projet d’un coup d’état contre Kabila quitte la RDC. Cinq cent Tutsis quittent la capitale dans la hâte avec les membres de leurs familles. Kabila, informé de la volonté étrangère de le destituer, décide de mettre fin à l’occupation de son pays. Le 27 juillet 1998, il annonce aux Congolais la fin de la présence des Rwandais. Lors de son discours, le président congolais remercie les rwandais de leur aide mais parle « de la fin de la présence de toute force militaire étrangère dans notre pays ». Ce propos a une portée fédératrice et L.D. Kabila incarne plus que jamais l’unité nationale.
La rébellion d’août 1998, orchestrée et soutenue par le Rwanda et l’Ouganda est motivée, d’une part, par l’indépendance encombrante de Kabila et, d’autre part, par son incapacité à sécuriser la région du Kivu où s’enracinent des mouvements de rébellions hostiles à leurs régimes respectifs. Les 2 et 3 août 1998, un soulèvement s’enclenche à l’Est du pays. Des combats opposent les soldats congolais aux soldats banyamulenges soutenant la rébellion, lesquels ont été rappelés pour participer à la prise de Kinshasa alors qu’ils se trouvaient dans le Bas Congo. Ceux-ci se retrouvent seuls à Kinshasa alors que les militaires tutsis rwandais ont déjà quitté la capitale. Les rebelles affirment avoir pris le contrôle de Goma et Bukavu. Ils décident de couper la centrale électrique d’Inga qui alimente Kinshasa, choix stratégique qui va être mal supporté par la population kinoise et qui va participer à la brutalité du soulèvement des Kinois.
2/ Le discours rwandophobe
Le régime de Kabila, mis en danger à l’Est du pays par la rébellion, est finalement sauvé par l’intervention et l’appui militaire du Zimbabwe, de l’Angola et de la Namibie [3] . Le Président du Zimbabwe, Robert Mugabe, voit dans cette alliance des débouchés économiques très attrayants pour sa manufacture d’armes et l’exploitation des riches minières du pays. L’Angola souhaite mettre fin, de son côté, aux incursions incessantes de l’UNITA dont certains éléments sont repliés en RDC et font fructifier l’exploitation diamantifère afin de financer l’effort de guerre de l’organisation.
Le régime de Kabila acculé par les rebelles, n’hésite pas à s’appuyer sur le sentiment nationaliste des Congolais qui renvoie opportunément à la question, toujours en suspens, de la nationalité des populations de l’Est d’origine rwandaise et au sentiment anti-tutsi généralisé dans la population. Pour se défendre de la rébellion arrivée aux portes de la capitale (à l’Est : N’Djili, Kinsangani et Masina), le 26 août 1998, le Président autoproclamé et son entourage décident en effet de mettre à contribution le peuple afin de sauvegarder l’unité nationale contre l’occupation étrangère jusqu’ici tolérée. Le gouvernement congolais accuse le Rwanda de soutenir les rebelles. Le pouvoir de Kinshasa exploite, en fait, le réel sentiment d’agression vécu par la majorité des congolais lors la rébellion et particulièrement des Kinois [4] . Le régime congolais choisit d’utiliser des mots qui font appel à l’imaginaire déjà utilisé lors du génocide rwandais de 1994 : les Rwandais sont les ennemis qu’il convient d’abattre à tout prix. Mais à l’Est du pays, ce sont les populations d’origine Hutus et leurs alliés qui ont été traqués et qui ont été victimes des exactions commises par les rebelles d’obédience tutsie du RCD-Goma.
L’amalgame s’accompagne d’un discours très violent. Le chef de cabinet de Kabila, Yerodia Domabassi, parle ainsi des « déchets, des microbes qu’il faut que l’on traque avec résolution ». Colette Braeckman cite un de ses discours à Lubumbashi, dans lequel il a demandé aux congolais du Bas-Congo « de se lever comme un seul homme pour jeter hors du pays l’ennemi commun ». Explicitant la marche de manœuvre à adopter, il a déclaré que « la population doit pour cela utiliser toutes les armes à disposition, y compris les fusils de chasse, les machettes, les pioches, les flèches, les bâtons et les pierres ». Cette appellation générale de « Rwandais » englobe les Rwandais et ceux qui leur ressemblent. De la réalité historique de l’immigration rwandaise naît dans la conscience collective de la plupart des congolais non rwandophones une haine xénophobe contre les « Rwandais » ou assimilés comme tels. Oubliant l’enracinement séculaire des Banyamulenge à l’Est du pays ou celui des Banyarwanda datant de la domination belge, ces populations sont désormais envisagées comme le soutien de la présence rwandaise au Congo.
L’appellation de « Banyamulenge » ne se limite plus dès lors à celle des Tutsis congolais du Sud-Kivu, occupant les plateaux de l’Itombwe, mais s’applique aux Tutsis des deux Kivu et à l’ensemble des Tutsis qui revendiquent la nationalité congolaise. Le pouvoir ne prend pas le soin de distinguer l’agresseur militaire des simples civils tutsis. A Kinshasa des « comités d’autodéfense populaire » sont mis en place, regroupant les jeunes de quartiers pauvres qui cherchent à débusquer tout infiltré potentiel. La population applique à la lettre les indications étatiques. C’est le début de la chasse aux Rwandais qui visent plus particulièrement les Tutsis, assimilés par le pouvoir et la population au régime de Kagame. La population, inflige aux envahisseurs le supplice du collier : une trentaine de rebelles sont brûlés vifs avec un pneu autour du cou. En outre, ceux qui ont des traits physiques qui font penser aux Tutsis sont aussi victimes des exactions de la population et des militaires comme les Bashi du Kivu : la morphologie fait office de preuve. La suspicion est généralisée contre toutes les personnes soupçonnées d’avoir des origines tutsies ou rwandaises ou contre les personnes proches de ceux-ci. L’organisation congolaise de défense des droits de l’homme « la Voix des sans Voix » fait état de 51 morts et de 200 blessés. D’autres sources estiment qu’il y a eu à 600 morts lors des affrontements. L’association Human Rights Watch s’est inquiétée du sort des Tutsis détenus en RDC dans un communiqué en date du 18 août 1998 et fait état de la détention de 800 Tutsis dont la plupart au camp militaire de Kokolo à Kinshasa, alors même qu’il s’agit de civils. La Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, citant un communiqué de presse de l’ASADHO en date du 9 septembre 1998, fait état d’autres détentions arbitraires au camp Tshatshi et dans différents cachots des services de renseignements et au cachot de Kin-mazière à Kinshasa-Gombe. Certaines ont été justifiées par les autorités congolaises par la volonté de protéger lesdites populations de la vindicte populaire pourtant instrumentalisée. En réalité, selon ces mêmes sources, une partie des détentions arbitraires ont été suivies d’exécutions sommaires ou de disparition non élucidées à ce jour.
Certains Tutsis se sont réfugiés à l’ambassade de Belgique, dans les locaux du Haut Commissariat aux réfugiés ou sont restés cachés à Kinshasa, ainsi qu’au couvent Batika à Lubumbashi. Pour protéger les Tutsis, restés à Kinshasa, les autorités congolaises ont mis en place, en novembre 1998, un « Site d’hébergement des personnes vulnérables » dans les locaux de l’Institut National de Sécurité sociale (INSS) situé dans la cité Maman Mobutu à Kinshasa. Des milliers de Tutsis ont quitté la RDC et ont été accueillis aux Etats-Unis, au Canada, en France et en Belgique après avoir transité par le Bénin ou le Cameroun. Selon les informations collectées lors de la mission du CEDOCA, entre 16 juin et le 5 août 2002 à Kinshasa, et confirmées par le rapport du Home Office d’octobre 2002, il restait encore plus de 300 Tutsis, mais aussi des Hutus et des personnes issues de mariages mixtes dans le centre de l’INSS en attente d’une réinstallation.
3/ La situation des banyamulenge à Kinshasa depuis 1998
Depuis ces évènements, la question de la nationalité des Banyarwanda du Kivu n’a toujours pas été résolue. Il en résulte un véritable un vide juridique qui les faits regarder par le CICR comme des apatrides [5] . Interrogé sur la difficile question de l’octroi des passeports pour les Congolais d’origine tutsie, y compris les Banyamulenge, la Commission Canadienne de l’Immigration et du statut de réfugiés répond que ces derniers ne sont pas reconnus comme des citoyens Congolais à part entière puisque la nationalité ne leur est pas reconnue.
Cependant comme le montre l’étude des différents rapports des offices gouvernementaux, des ONG internationales et des associations locales de défense des droits de l’Homme comme l’ASADHO, les Tutsis congolais ne sont plus victimes des consignes gouvernementales d’une violence xénophobe organisée, depuis la fin des pogroms d’août et septembre 1998.
Les Tutsis congolais ne sont plus considérés comme encourant des risques spécifiques dans la capitale. Il n’en reste pas moins que les trois cents Tutsis congolais, recensés à Kinshasa, se trouvent encore dans le camp de l’INSS, sous la protection des autorités, en attente d’une réinstallation à l’étranger. Leur disparition de la capitale peut en partie s’expliquer par la violence et la cruauté des exactions dont ils ont été victimes et qui les ont poussés à se réfugier à l’étranger ou partir en zone rebelle. Les années qui ont suivi ces tueries ont été marquées par d’autres préoccupations du pouvoir en place à Kinshasa. Le président L.D. Kabila a d’abord interdit toute activité politique, refusant toute expression d’une opposition. Son assassinat le 16 janvier 2001 et la reprise du pouvoir par son fils Joseph ont été suivis de nombreuses arrestations arbitraires et de l’inculpation de 135 prévenus dans le cadre du procès de ses assassins présumés. La situation de grande pauvreté qui sévit à Kinshasa, explique pour beaucoup la violence qui y règne et dont font état les ressortissants de la RDC. L’insécurité existant dans la capitale est, en effet, souvent le fait de bandits ou de membres des Forces Armées Congolaises (FAC), agissant en dehors de tout contrôle et se rétribuant directement sur la population.
4/ La situation des communauté Banyarwanda et Banyamulenge dans la zone de rébellion
La RDC est le théâtre d’incessants combats entre les multiples belligérants de la guerre qui fait rage à l’Est du pays depuis 1998. Les richesses minières du pays encouragent, en effet, ses voisins à piller le Congo tout en alimentant à moindres frais l’effort de guerre. Les alliances d’hier (Rwanda et Ouganda) autrefois indéfectibles ont perdu leur raison d’être devant la potentialité des riches sols congolais comme c’est le cas en Ituri. Certains miliciens Maï Maï, autrefois proches du pouvoir central et des Hutus, ont rejoint l’effort de guerre des Rwandais.
Dans ce conflit dont l’issue reste incertaine et dont les données changent quotidiennement, les Banyamulenges apparaissent actuellement comme les perdants. Pour certains, l’argument selon lequel les Rwandais sont intervenus dans le Kivu afin d’apporter une protection à leurs cousins banyamulenge en raison de leurs origines Tutsies communes est un leurre. Il s’agirait, en réalité, pour les Rwandais de s’implanter durablement au Congo afin d’étendre leur influence et d’y puiser les richesses. Le pouvoir rwandais a, en outre, incité certains d’entre eux à retourner au Rwanda pour qu’ils y soient à l’abri des massacres. La volonté de transférer les Tutsis Congolais au Rwanda pour leur garantir une certaine sécurité a été mal acceptée par ces derniers alors que le pouvoir de Kigali n’a pas été en mesure d’arrêter les massacres des Tutsis du Nord Kivu dans les camps de réfugiés. Il y a donc eu un soulèvement de deux milles hommes, dans le Sud-Kivu au début de l’année 2002, avec à sa tête le commandant banyamulenge Patrick Mazunzu. Ce mouvement de rébellion a confirmé une volonté des certains banyamulenge de se départir du RCD-Goma et de ses parrains rwandais.
Il s’agit là encore pour les Banyamulenge de revendiquer avec force l’authenticité de la réalité de leur identité rwandaise au Congo. La reconnaissance de cette identité apparaît indispensable pour la réussite du processus de paix en République Démocratique du Congo.
[1] Le préfixe « ba » indique qu’il s’agit d’un pluriel et le préfixe « mu » d’un singulier. Banyarwanda : signifie les gens du Rwanda.
[2] Article 15 de la loi n°72-002 du 5 janvier 1972 relative à la nationalité zaïroise, JO n° 2 du 15/01/1972 p 45
[3] Tous trois membres comme la RDC de la Communauté de développement d’Afrique Australe (SADC), à laquelle n’appartiennent pas le Rwanda et l’Ouganda.
[4] « Les zones de rébellion en RDC », V. Coulondre, Service de documentation géopolitique, CRR.
[5] CICR, Rapport d’activité 1996 au Zaïre et CEDOCA, rapport de mission p.22.
Abatabizi bicwa no kutabimenya.
Nikozitambirwa.

asile politique textes fondamentaux

Convention Geneve asile politique du 28 juillet 1951

Convention de Genève
Parution : 16/02/2005

Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés entrée en vigueur le 22 avril 1954

Préambule
Les Hautes parties contractantes,
Considérant que la charte des Nations unies et la déclaration universelle des droits de l’homme approuvée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée générale ont affirmé ce principe que les êtres humains, sans distinction, doivent jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales,
Considérant que l’Organisation des Nations unies a, à plusieurs reprises, manifesté la profonde sollicitude qu’elle éprouve pour les réfugiés et qu’elle s’est préoccupée d’assurer à ceux-ci l’exercice le plus large possible des droits de l’homme et des libertés fondamentales,
Considérant qu’il est désirable de réviser et de codifier les accords internationaux antérieurs relatifs au statut des réfugiés et d’étendre l’application de ces instruments et la protection qu’ils constituent pour les réfugiés au moyen d’un nouvel accord,
Considérant qu’il peut résulter de l’octroi du droit d’asile des charges exceptionnellement lourdes pour certains pays et que la solution satisfaisant des problèmes dont l’Organisation des Nations unies a reconnu la protée et le caractère internationaux, ne saurait, dans cette hypothèse, être obtenue sans une solidarité internationale,
Exprimant le vœu que les Etats, reconnaissant le caractère social et humanitaire du problème des réfugiés, fassent out ce qui est en leur pouvoir pour éviter que ce problème ne devienne une cause de tension entre Etats,
Prenant acte de ce que le Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés a pour tâche de veiller à l’application des conventions internationales qui assurent la protection des réfugiés, et reconnaissant que la coordination effective des mesures prises pour résoudre ce problème dépendra de la coopération des Etats avec le Haut Commissaire,
Sont convenues des dispositions ci-après :

Chapitre I Dispositions générales

Article premier

Définition du terme "réfugié"

A. Aux fins de la présente convention, le terme « réfugié » s’appliquera à toute personne :
(1) Qui a été considérée comme réfugiée en application des arrangements du 12 mai 1926 et du 30 juin 1928, ou en application des conventions du 28 octobre 1933 et du 10 février 1938 et du protocole du 14 septembre 1939, ou encore en application de la Constitution de l’Organisation internationale pour les réfugiés ;
Les décisions de non-éligibilité prises par l’Organisation internationale pour les réfugiés pendant la durée de son mandat ne font pas obstacle à ce que la qualité de réfugié soit accordée à des personnes qui remplissent les conditions prévues au paragraphe 2 de la présente section ;
(2) Qui, par suite d’événements survenus avant le 1er janvier 1951 et craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.
Dans le cas d’une personne qui a plus d’une nationalité, l’expression « du pays dont elle a la nationalité » vise chacun des pays dont cette personne a la nationalité. Ne sera pas considérée comme privée de la protection du pays dont elle a la nationalité, toute personne qui, sans raison valable fondée sur une crainte justifiée, ne s’est pas réclamée de la protection de l’un des pays dont elle a la nationalité.
B. (1) Aux fins de la présente convention les mots « événements survenus avant le 1er janvier 1951 » figurant à l’article 1, section A, pourront être compris dans le sens de soit
a) « événements survenus avant le 1er janvier 1951 en Europe » ;
soit
b) « événements survenus avant le 1er janvier 1951 en Europe ou ailleurs » ;
et chaque État contractant fera, au moment de la signature, de la ratification ou de l’adhésion, une déclaration précisant la portée qu’il entend donner à cette expression au point de vue des obligations assumées par lui en vertu de la présente convention.
(2) Tout Etat contractant qui a adopté la formule a) pourra à tout moment étendre ses obligations en adoptant la formule b) par notification adressée au Secrétaire général des Nations unies.
C. Cette convention cessera, dans les cas ci-après, d’être applicable à toute personne visée par les dispositions de la section A ci-dessus :
(1) Si elle s’est volontairement réclamée à nouveau de la protection du pays dont elle a la nationalité ; ou (2) Si ayant perdu sa nationalité, elle l’a volontairement recouvrée ; ou
(3) Si elle a acquis une nouvelle nationalité et jouit de la protection du pays dont elle a acquis la nationalité ; ou
(4) Si elle est retournée volontairement s’établir dans le pays qu’elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d’être persécutée ; ou
(5) Si, les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé d’exister, elle ne peut plus continuer à refuser de se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité ;
Étant entendu, toutefois, que les dispositions du présent paragraphe ne s’appliqueront pas à tout réfugié visé au paragraphe 1 de la section A du présent article qui peut invoquer, pour refuser de se réclamer de la protection du pays dont il a la nationalité, des raisons impérieuses tenant à des persécutions antérieures ;
(6) S’agissant d’une personne qui n’a pas de nationalité, si les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé d’exister, elle est en mesure de retourner dans le pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle ;
Étant entendu, toutefois, que les dispositions du présent paragraphe ne s’appliqueront pas à tout réfugié visé au paragraphe 1 de la section A du présent article qui peut invoquer, pour refuser de retourner dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, des raisons impérieuses tenant à des persécutions antérieures.
D. Cette convention ne sera pas applicable aux personnes qui bénéficient actuellement d’une protection ou d’une assistance de la part d’un organisme ou d’une institution des Nations unies autre que le Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés.
Lorsque cette protection ou cette assistance aura cessé pour une raison quelconque, sans que le sort de ces personnes ait été définitivement réglé, conformément aux résolutions y relatives adoptées par l’Assemblée générale des Nations unies, ces personnes bénéficieront de plein droit du régime de cette convention.
E. Cette convention ne sera pas applicable à une personne considérée par les autorités compétentes du pays dans lequel cette personne a établi sa résidence comme ayant les droits et les obligations attachés à la possession de la nationalité de ce pays ;
F. Les dispositions de cette convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :
a) qu’elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou crime contre l’humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes ;
b) qu’elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiées ;
c) qu’elles se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies.

Article 2
Obligations générales
Tout réfugié a, à l’égard du pays où il se trouve, des devoirs qui comportent notamment l’obligation de se conformer aux lois et règlements ainsi qu’aux mesures prises pour le maintien de l’ordre public.

Article 3
Non discrimination
Les Etats contractants appliqueront les dispositions de cette convention aux réfugiés sans discrimination quant à sa race, la religion ou le pays d’origine.

Article 4
Religion
Les Etats contractants accorderont aux réfugiés sur leur territoire un traitement au moins aussi favorable que celui accordé aux nationaux en ce qui concerne la liberté de pratiquer leur religion et en ce qui concerne la liberté d’instruction religieuse de leurs enfants.

Article 5
Droits accordés indépendamment de cette convention
Aucune disposition de cette convention ne porte atteinte aux autres droits et avantages accordés, indépendamment de cette convention, aux réfugiés.

Article 6
L’expression « dans les mêmes circonstances »
Aux fins de cette convention, les termes « dans les mêmes circonstances » impliquent que toutes les conditions (et notamment celles qui ont trait à la durée et aux conditions de séjour ou de résidence) que l’intéressé devrait remplir, pour pouvoir exercer le droit en question, s’il n’était pas un réfugié, doivent être remplies par lui à l’exception des conditions qui, en raison de leur nature, ne peuvent être remplies par un réfugié.

Article 7
Dispense de réciprocité
1.Sous réserve des dispositions plus favorables prévues par cette convention, tout Etat contractant accordera aux réfugiés le régime qu’il accorde aux étrangers en général.
2. Après un délai de résidence de trois ans, tous les réfugiés bénéficieront, sur le territoire des Etats contractants, de la dispense de réciprocité législative.
3. Tout Etat contractant continuera à accorder aux réfugiés les droits et avantages auxquels ils pouvaient déjà prétendre, en l’absence de réciprocité, à la date d’entrée en vigueur de cette convention pour ledit Etat.
4. Les Etats contractants envisageront avec bienveillance la possibilité d’accorder aux réfugiés, en l’absence de réciprocité, des droits et des avantages outre ceux auxquels ils peuvent prétendre en vertu des paragraphes 2 et 3 ainsi que la possibilité de faire bénéficier de la dispense de réciprocité des réfugiés qui ne remplissent pas les conditions visées aux paragraphes 2 et 3.
5. Les dispositions des paragraphes 2 et 3 ci-dessus s’appliquent aussi bien aux droits et avantages visés aux article 13, 18, 19, 21 et 22 de cette convention qu’aux droits et avantages qui ne sont pas prévus par elle.

Article 8
Dispense de mesures exceptionnelles
En ce qui concerne les mesures exceptionnelles qui peuvent être prises contre la personne, les biens ou les intérêts des ressortissants d’un Etat déterminé, les Etats contractants n’appliqueront pas ce mesures à un réfugié ressortissant formellement dudit Etat uniquement en raison de sa nationalité. Les Etats contractants qui, de par leur législation, ne peuvent appliquer le principe général consacré dans cet article accorderont dans des cas appropriés des dispenses en faveur de tels réfugiés.

Article 9
Mesures provisoires
Aucune des dispositions de la présente convention n’a pour effet d’empêcher un Etat contractant, en temps de guerre ou dans d’autres circonstances graves et exceptionnelles, de prendre provisoirement, à l’égard d’une personne déterminée, les mesures que cet Etat estime indispensables à la sécurité nationale, en attendant qu’il soit établi par ledit Etat contractant que cette personne est effectivement un réfugié et que le maintien desdites mesures est nécessaire à son égard dans l’intérêt de sa sécurité nationale.

Article 10
Continuité de résidence
1. Lorsqu’un réfugié a été déporté au cours de la deuxième guerre mondiale et transporté sur le territoire de l’un des Etats contractants et y réside, la durée de ce séjour forcé comptera comme résidence régulière sur ce territoire.
2. Lorsqu’un réfugié a été déporté du territoire d’un Etat contractant au cours de la deuxième guerre mondiale et y est retourné avant l’entrée en vigueur de cette convention pou y établir sa résidence, la période qui précède et celle qui suit cette déportation seront considérées, à toutes les fins pour lesquelles une résidence ininterrompue est nécessaire, comme ne constituant qu’une seule période ininterrompue.

Article 11
Gens de mer réfugiés
Dans le cas de réfugiés régulièrement employés comme membres de l’équipage à bord d’un navire battant pavillon d’un Etat contractant, cet Etat examinera avec bienveillance la possibilité d’autoriser lesdits réfugiés à s’établir sur son territoire et de leur délivrer des titres de voyage ou de les admettre à titre temporaire sur son territoire, afin, notamment, de faciliter leur établissement dans un autre pays.

Chapitre II
Condition juridique

Article 12

Statut personnel
1. Le statut personnel de tout réfugié sera régi par la loi du pays de son domicile ou, à défaut de domicile, par la loi du pays de sa résidence.
2. Les droits, précédemment acquis par le réfugié et découlant du statut personnel, et notamment ceux qui résultent du mariage, seront respectés par tout Etat contractant, sous réserve, le cas échéant, de l’accomplissement des formalités prévues par la législation dudit Etat, étant entendu, toutefois, que le droit en cause doit être de ceux qui auraient été reconnus par la législation dudit Etat si l’intéressé n’était devenu un réfugié.

Article 13
Propriété mobilière et immobilière
Les Etats contractants accorderont à tout réfugié un traitement aussi favorable que possible et de toute façon un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui qui est accordé, dans les mêmes circonstances, aux étrangers en général en ce qui concerne l’acquisition de la propriété mobilière et immobilière et autres droits s’y rapportant, le louage et les autres contrats relatifs à la propriété mobilière et immobilière.

Article 14
Propriété intellectuelle et industrielle
En matière de protection de la propriété industrielle notamment d’inventions, dessins, modèles, marques de fabrique, nom commercial, et en matière de protection de la propriété littéraire, artistique et scientifique, tout réfugié bénéficiera dans le pays où il a sa résidence habituelle de la protection qui est accordée aux nationaux du pays dans lequel il a sa résidence habituelle.

Article 15
Droits d’association
Les Etats contractants accorderont aux réfugiés qui résident régulièrement sur leur territoire, en ce qui concerne les associations à but non politique et non lucratif et les syndicats professionnels, le traitement le plus favorable accordé aux ressortissants d’un pays étranger, dans les mêmes circonstances.

Article 16
Droit d’ester en justice
1. Tout réfugié aura, sur le territoire des Etats contractants, libre et facile accès devant les tribunaux.
2. Dans l’Etat contractant où il a sa résidence habituelle, tout réfugié jouira du même traitement qu’un ressortissant en ce qui concerne l’accès aux tribunaux, y compris l’assistance judiciaire et l’exemption de la caution judicatum solvi.
3. Dans les Etats contractants autres que celui où il a sa résidence habituelle, et en ce qui concerne les questions visées au paragraphe 2, tout réfugié jouira du même traitement qu’un national du pays dans lequel il a sa résidence habituelle.

Chapitre III
Emplois lucratifs

Article 17
Professions salariées
1. Les Etats contractants accorderont à tout réfugié résidant régulièrement sur leur territoire le traitement le plus favorable accordé, dans les mêmes circonstances, aux ressortissants d’un pays étranger en ce qui concerne l’exercice d’une activité professionnelle salariée.
2. En tout cas, les mesures restrictives imposées aux étrangers ou à l’emploi d’étrangers pour la protection du marché national du travail ne seront pas applicables aux réfugiés qui en étaient déjà dispensés à la date de l’entrée en vigueur de cette convention par l’Etat contractant intéressé, ou qui remplissent l’une des conditions suivantes :
a) compter trois ans de résidence dans le pays,
b) avoir pour conjoint une personne possédant la nationalité du pays de résidence. Un réfugié ne pourrait invoquer le bénéfice de cette disposition au cas où il aurait abandonné son conjoint,
c) avoir un ou plusieurs possédant la nationalité du pays de résidence.
3. Les Etats contractants envisageront avec bienveillance l’adoption de mesures tendant à assimiler les droits de tous les réfugiés en ce qui concerne l’exercice des professions salariées à ceux de leurs nationaux et ce, notamment pour les réfugiés qui sont entrés sur leur territoire en application d’un programme de recrutement de la main d’œuvre ou d’un plan d’immigration.

Article 18
Professions non salariées
Les Etats contractants accorderont aux réfugiés se trouvant régulièrement sur leur territoire le traitement aussi favorable que possible et en tout cas un traitement non moins favorable que celui accordé dans les mêmes circonstances aux étrangers en général, en ce qui concerne l’exercice d’une profession non salariée dans l’agriculture, l’industrie, l’artisanat et le commerce, ainsi que la création de sociétés commerciales et industrielles.

Article 19
Professions libérales
1. Tout Etat contractant accordera aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire, qui sont titulaires de diplômes reconnus par les autorités compétentes dudit Etat et qui sont désireux d’exercer une profession libérale, un traitement aussi favorable que celui accordé, dans les mêmes circonstances, aux étranges en général.
2. Les Etats contractants feront tout ce qui est en leur pouvoir conformément à leurs lois et constitutions, pour assurer l’installation de tels réfugiés dans les territoires, autres que le territoire métropolitain dont ils assument la responsabilité des relations internationales.

Chapitre IV
Bien-être

Article 20
Rationnement
Dans le cas où il existe un système de rationnement auquel est soumise la population dans son ensemble et qui réglemente la répartition générale de produits dont il y a pénurie, les réfugiés seront traités comme les nationaux.

Article 21
Logement
En ce qui concerne le logement, les Etats contractants accorderont, dans la mesure où cette question tombe sous le coup des lois et règlements ou est soumise au contrôle des autorités publique, aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire un traitement aussi favorable que possible ; ce traitement ne saurait être, en tout cas, moins favorable que celui qui est accordé, dans les mêmes circonstances, aux étrangers en général.

Article 22
Éducation publique
1. Les Etats contractants accorderont aux réfugiés le même traitement qu’aux nationaux en ce qui concerne l’enseignement primaire.
2. Les Etats contractants accorderont aux réfugiés un traitement aussi favorable que possible, et en tout cas moins favorable que ce celui qui est accordé aux étrangers en général dans les mêmes circonstances quant aux catégories d’enseignement autre que l’enseignement primaire et notamment en ce qui concerne l’accès aux études, la reconnaissance de certificats d’études, de diplômes et de titres universitaires délivrés à l’étranger, la remise des droits et taxes et l’attribution de bourses d’études.

Article 23
Assistance publique
Les Etats contractants accorderont aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire le même traitement en matière d’assistance et de secours publics qu’à leurs nationaux.

Article 24
Législation du travail et sécurité sociale
1. Les Etats contractants accorderont aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire le même traitement qu’aux nationaux en ce qui concerne les matières suivantes :
a) Dans la mesure où ces questions sont réglementées par la législation ou dépendent des autorités administratives, la rémunération, y compris les allocations familiales lorsque ces allocations font partie de la rémunération, la durée du travail, les heures supplémentaires, les congés payés, les restrictions au travail à domicile, l’âge d’admission à l’emploi, l’apprentissage et la formation professionnelle, le travail des femmes et des adolescents et la jouissance des avantages offerts par les conventions collectives ;
b) La sécurité sociale (les dispositions légales relatives aux accidents du travail, aux maladies professionnelles, à la maternité, à la maladie, à l’invalidité, à la vieillesse et au décès, au chômage, aux charges de famille, ainsi qu’à tout autre risque qui, conformément à la législation nationale, est couvert par un système de sécurité sociale), sous réserve :
i) Des arrangements appropriés visant le maintien des droits acquis et des droits en cours d’acquisition ;
ii) Des dispositions particulières prescrites par la législation nationale du pays de résidence et visant les prestations ou fractions de prestations payables exclusivement sur les fonds publics, ainsi que les allocations versées aux personnes qui ne réunissent pas les conditions de cotisation exigées pour l’attribution d’une pension normale.
2. Les droits à prestation ouverts par le décès d’un réfugié survenu du fait d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne seront pas affectés par le fait que l’ayant droit réside en dehors du territoire de l’Etat contractant.
3. Les Etats contractants étendront aux réfugiés le bénéfice des accords qu’ils ont conclu ou viendront à conclure entre eux, concernant le maintien des droits acquis ou en cours d’acquisition en matière de sécurité sociale, pour autant que les réfugiés réunissent les conditions prévues pour les nationaux des pays signataires des accords en question.
4. Les Etats contractants examineront avec bienveillance la possibilité d’étendre, dans la mesure du possible, aux réfugiés, le bénéfice d’accords similaires qui sont ou seront en vigueur entre ces Etats contractants et des Etats non contractants ;

Chapitre V
Mesures administratives

Article 25
Aide administrative
1. Lorsque l’exercice d’un droit par un réfugié nécessiterait normalement le concours d’autorités étrangères auxquelles il ne peut recourir, les Etats contractants sur le territoire desquels il réside veilleront à ce que ce concours lui soit fourni soit par leurs propres autorités, soit par une autorité internationale.
2. Là où les autorités visées au paragraphe 1 délivreront ou feront délivrer, sous leur contrôle, aux réfugiés, les documents ou certificats qui normalement seraient délivrés à un étranger par ses autorités nationales ou par leur intermédiaire.
3. Les documents ou certificats ainsi délivrés remplaceront les actes officiels délivrés à des étrangers par leurs autorités nationales ou par leur intermédiaire, et feront foi jusqu’à preuve du contraire.
4. Sous réserve des exceptions qui pourraient être admises en faveur des indigents, les services mentionnés dans le présent article pourront être rétribués ; mais ces rétributions seront modérées et en rapport avec les perceptions opérées sur les nationaux à l’occasion de services analogues.
5. Les dispositions de cet article n’affectent en rien les articles 27 et 28.

Article 26
Liberté de circulation
Tout Etat contractant accordera aux réfugiés se trouvant régulièrement sur son territoire le droit d’y choisir leur lieu de résidence et d’y circuler librement sous les réserves instituées par la réglementation applicable aux étrangers en général dans les mêmes circonstances.

Article 27
Pièces d’identité
Les Etats contractants délivreront des pièces d’identité à tout réfugié se trouvant sur leur territoire et qui ne possède pas un titre de voyage valable.

Article 28
Titres de voyage
1. Les Etats contractants délivreront aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire, des titres de voyage destinés à leur permettre de voyager hors de ce territoire à moins que des raisons impérieuses de sécurité nationale ou d’ordre public ne s’y opposent ; les dispositions de l’Annexe à cette Convention s’appliqueront à ces documents à ces documents. Les Etats contractants pourront délivrer un tel titre de voyage à tout autre réfugié se trouvant sur leur territoire ; ils accorderont une attention particulière aux cas de réfugiés se trouvant sur leur territoire et qui ne sont pas en mesure d’obtenir un titre de voyage du pays de leur résidence régulière.
2. Les documents de voyage délivrés aux termes d’accords internationaux antérieurs par les Parties à ces accords seront reconnus par les Etats contractants, et traités comme s’ils avaient été délivrés aux réfugiés en vertu du présent article.

Article 29
Charges fiscales
1. Les Etats contractants n’assujettiront pas les réfugiés à des droits, taxes, impôts, sous quelque dénomination que ce soit, autres ou plus élevés que ceux qui sont ou qui seront perçus sur leurs nationaux dans des situations analogues.
2. Les dispositions du paragraphe précédent ne s’opposent pas à l’application aux réfugiés des dispositions des lois et règlements concernant les taxes afférentes à la délivrance aux étrangers de documents administratifs, pièces d’identité y comprises.

Article 30
Transfert des avoirs
1. Tout Etat contractant permettra aux réfugiés, conformément aux lois et règlements de leur pays, de transférer les avoirs qu’ils ont fait entrer sur son territoire, dans le territoire d’un autre pays où ils ont été admis afin de s’y réinstaller.
2. Tout Etat contractant accordera sa bienveillance attention aux demandes présentées par des réfugiés qui désirent obtenir l’autorisation de transférer tous autres avoirs nécessaires à leur réinstallation dans un autre pays où ils ont été admis afin de s’y réinstaller.

Article 31
Réfugiés en situation irrégulière dans le pays d’accueil
1. Les Etats contractants n’appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée au sens prévu par l’article premier, entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation, sous la réserve qu’ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières.
2. Les États contractants n’appliqueront aux déplacements de ces réfugiés d’autres restrictions que celles qui sont nécessaires ; ces restrictions seront appliquées seulement en attendant que le statut des réfugiés dans le pays d’accueil ait été régularisé ou qu’ils aient réussi à se faire admettre dans un autre pays. En vue de cette dernière admission les Etats contractants accorderont à ces réfugiés un délai raisonnable ainsi que toutes facilités nécessaires.

Article 32
Expulsion
1. Les États contractants n’expulseront un réfugié se trouvant régulièrement sur leur territoire que pour des raisons de sécurité nationale ou d’ordre public.
2. L’expulsion de ce réfugié n’aura lieu qu’en exécution d’une décision rendue conformément à la procédure prévue par la loi. Le réfugié devra, sauf si des raisons impérieuses de sécurité nationale s’y opposent, être admis à fournir des preuves tendant à le disculper, à présenter un recours et à se faire représenter à cet effet devant une autorité compétente ou devant une ou plusieurs personnes spécialement désignées par l’autorité compétente.
3. Les États contractants accorderont à un tel réfugié un délai raisonnable pour lui permettre de chercher à se faire admettre régulièrement dans un autre pays. Les Etats contractants peuvent appliquer, pendant ce délai, telle mesure d’ordre interne qu’ils jugeront opportune.

Article 33
Défense d’expulsion et de refoulement
1. Aucun des États contractants n’expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.
2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu’il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l’objet d’un condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays.

Article 34
Naturalisation
Les États contractants faciliteront, dans toute la mesure du possible, l’assimilation et la naturalisation des réfugiés. Ils s’efforceront notamment d’accélérer la procédure de naturalisation et de réduire, dans toute la mesure du possible, les taxes et les frais de cette procédure.

Chapitre VI
Dispositions exécutoires et transitoires

Article 35
Coopération desautorités nationales avec les Nations unies
1. Les États contractants s’engagent à coopérer avec le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, ou toute autre institution des Nations unies qui lui succéderait, dans l’exercice de ses fonctions et en particulier à faciliter sa tâche de surveillance de l’application des dispositions de cette convention.
2. Afin de permettre au Haut Commissariat ou à toute autre institution des Nations unies qui lui succéderait de présenter des rapports aux organes compétents des Nations unies, les États contractants s’engagent à leur fournir dans la forme appropriée les informations et les données statistiques demandées relatives :
a) au statut des réfugiés,
b) à la mise en œuvre de cette convention, et
c) aux lois, règlements et décrets, qui sont ou entreront en vigueur en ce qui concerne les réfugiés.

Article 36
Renseignements portant sur les lois et règlements nationaux
Les États contractants communiqueront au Secrétaire général des Nations unies le texte des lois et des règlements qu’ils pourront promulguer pour assurer l’application de cette convention.

Article 37
Relations avec les conventions antérieures
Sans préjudice des dispositions du paragraphe 2 de l’article 28, cette convention remplace, entre les Parties à la convention, les accords du 5 juillet 1922, 31 mai 1924, 12 mai 1926, 30 juin 1928 et 30 juillet 1935, ainsi que les conventions des 28 octobre 1933, 10 février 1938, le protocole du 14 septembre 1939 et l’accord du 15 octobre 1946.

Chapitre VII
Clauses finales

Article 38
Règlement des différends
Tout différend entre les Parties à cette convention relatif à son interprétation ou à son application, qui n’aura pu être réglé par d’autres moyens, sera soumis à la Cour Internationale de justice à la demande de l’une des Parties au différend.

Article 39
Signature, ratification et adhésion
1. Cette convention sera ouverte à la signature à Genève le 28 juillet 1951 et, après cette date, déposée auprès du Secrétaire général des Nations unies. Elle sera ouverte à la signature à l’Office européen des Nations unies du 28 juillet au 31 août 1951, puis ouverte à nouveau à la signature au Siège de l’Organisation des Nations unies du 17 septembre 1951 au 31 décembre 1952.
2. Cette convention sera ouverte à la signature de tous les États Membres de l’Organisation des Nations unies ainsi que de tout autre État non membre invité à la conférence de plénipotentiaires sur le statut des réfugiés et des apatrides ou de tout Etat auquel l’Assemblée générale aura adressé une invitation à signer. Elle devra être ratifiée et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général des Nations unies.
3. Les États visés au paragraphe 2 du présent article pourront adhérer à cette convention à dater du 28 juillet 1951 ; L’adhésion se fera par le dépôt d’un instrument d’adhésion auprès du Secrétaire général des Nations unies.

Article 40
Clause d’application territoriale
1. Tout État pourra, au moment de la signature, ratification ou adhésion, déclarer que cette convention s’étendra à l’ensemble des territoires qu’il représente sur le plan international, où à l’un ou plusieurs d’entre eux. Une telle déclaration produira ses effets au moment de l’entrée en vigueur de la convention pour ledit État.
2. A tout moment ultérieur cette extension se fera par notification adressée au Secrétaire général des Nations unies et produira ses effets à partir du quatre-vingt-dixième jour qui suivra la date à laquelle le Secrétaire général des Nations unies aura reçu la notification ou à la date d’entrée en vigueur de la convention pour ledit État si cette dernière date est postérieure.
3. En ce qui concerne les territoires auxquels cette convention ne s’appliquerait pas à la date de la signature, ratification ou adhésion, chaque État intéressé examinera la possibilité de prendre aussitôt que possible toutes mesures nécessaires afin d’aboutir à l’application de cette convention auxdits territoires sous réserve, le cas échéant, de l’assentiment des gouvernements de ces territoires qui serait requis pour raisons constitutionnelles.

Article 41
Clause fédérale
Dans le cas d’un État fédératif ou non unitaire, les dispositions ci-après s’appliqueront :
a) En ce qui concerne les articles de cette convention dont la mise en œuvre relève de l’action législative du pouvoir législatif fédéral, les obligations du gouvernement fédéral seront, dans cette mesure, les mêmes que celles des Parties qui ne sont pas des États fédératifs ;
b) En ce qui concerne les articles de cette convention dont l’application relève de l’action législative de chacun des états, provinces ou cantons constituants, qui ne sont pas, en vertu du système constitutionnel de la fédération, tenus de prendre des mesures législatives, le gouvernement fédéral portera le plus tôt possible, et avec son avis favorable, lesdits articles à la connaissance des autorités compétentes des états, provinces ou cantons.
c) Un Etat fédératif Partie à cette convention communiquera, à la demande de tout autre Etat contractant qui lui aura été transmise par le Secrétaire général des Nations unies, un exposé de la législation et des pratiques en vigueur dans la Fédération et ses unités constituantes en ce qui concerne telle ou telle disposition de la convention, indiquant la mesure dans laquelle effet a été donné, par une action législative ou autre, à ladite disposition.

Article 42
Réserves
1. Au moment de la signature, de la ratification ou de l’adhésion, tout État pourra formuler des réserves aux articles de la convention autres que les articles 1,3,4, 16 (1), 33, 36 à 46 inclus.
2. Tout État contractant ayant formulé une réserve conformément au paragraphe 1 de cet article pourra à tout moment la retirer par une communication à cet effet adressée au secrétaire général des Nations unies.
Article 43
Entrée en vigueur
1. Cette convention entrera en vigueur le quatre vingt-dixième jour qui suivra la date de dépôt du sixième instrument de ratification ou d’adhésion.
2. Pour chacun des États qui ratifieront la convention ou y adhéreront après le dépôt du sixième instrument de ratification ou d’adhésion, elle entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour qui suivra la date du dépôt par cet État de son instrument de ratification ou d’adhésion.
Article 44
Dénonciation
1. Tout Etat contractant pourra dénoncer la convention à tout moment par notification adressée au Secrétaire général des Nations unies.
2. La dénonciation prendra effet pour l’Etat intéressé un an après la date à laquelle elle aura été reçue par le Secrétaire général des Nations unies.
3. Tout Etat qui a fait une déclaration ou une notification conformément à l’article 40 pourra notifier ultérieurement au Secrétaire général des Nations unies que la convention cessera de s’appliquer à tout territoire désigné dans la notification. La convention cessera alors de s’appliquer au territoire en question un an après la date à laquelle le Secrétaire général aura reçu cette notification.

Article 45
Notification par le Secrétaire général des Nations unies
Le Secrétaire général des Nations unies notifiera à tous les États membres des Nations unies et aux États nom membres visés à l’article 39 :
a) les déclarations et les notifications visées à la section B de l’article premier ;
b) les signatures, ratifications et adhésions visées à l’article 39 ;
c) les déclarations et les notifications visées à l’article 40 ;
d) les réserves formulées ou retirées visées à l’article 42 ; e) la date à laquelle cette convention entrera en vigueur, en application de l’article 43 ;
f) les dénonciations et les notifications visées à l’article 44 ;
g) les demandes de révision visées à l’article 45.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés, ont signé, au nom de leurs Gouvernements respectifs, la présente convention.
Fait à Genève, le 28 juillet mil neuf cent cinquante et un, en un seul exemplaire dont les textes anglais et français font également foi et qui sera déposé dans les archives de l’Organisation des Nations unies et dont les copies certifiées conformes seront remises à tous les États membres des Nations unies et aux États non membres visés à l’article 39.
Acte final de la conférence de plénipotentiaires des Nations unies sur le statut des réfugiés et apatrides (extraits)
La conférence a adopté à l’unanimité les recommandations suivantes :
A
« La conférence,
« Considérant que la délivrance et la reconnaissance des titres de voyage sont nécessaires pour faciliter le mouvement des réfugiés et, en particulier, leur réinstallation,
« Demande instamment aux gouvernements parties à l’accord concernant la délivrance d’un titre de voyage à des réfugiés relevant de la compétence du Comité intergouvernemental pour les réfugiés, signé à Londres le 15 octobre 1946, ou qui reconnaissant la validité des titres de voyage délivrés conformément aux dispositions ce cet accord, de continuer à délivrer ou à reconnaître lesdits titres de voyage et de délivrer ces titres de voyage à tous les réfugiés répondant à la définition donnée de ce terme à l’article premier de la convention relative au statut des réfugiés ou de reconnaître les titres de voyage ainsi délivrés à ces personnes, jusqu’à ce qu’ils aient assumé les obligations qui découlent de l’article 28 de ladite convention ; »
B
« La conférence,
« Considérant que l’unité de famille, cet élément naturel et fondamental de la société, est un droit essentiel du réfugié, et que cette unité est constamment menacée, et « Constatant avec satisfaction que, d’après le commentaire officiel du Comité spécial de l’apatridie et des problèmes connexes (E/1618, p. 38) les droits de réfugié sont étendus aux membres de sa famille,
« Recommande aux gouvernements de prendre les mesures nécessaires pour la protection de la famille du réfugié et en particulier pour :
« (1) Assurer le maintien de l’unité de la famille du réfugié, notamment dans le cas où le chef de la famille a réuni les conditions voulues pour son admission dans un pays ;
« (2) Assurer la protection des réfugiés mineurs, notamment des enfants isolés et des jeunes filles, spécialement en ce qui concerne la tutelle et l’adoption."
C
« La conférence,
« Considérant que le réfugié a besoin, dans les divers domaines moraux, juridiques et matériels, du concours de services sociaux appropriés, notamment et celui des organisation non gouvernementales qualifiées,
« Recommande aux gouvernements et aux organismes intergouvernementaux de faciliter, d’encourager et de soutenir les efforts des organisations dûment qualifiées pour leur tâche. »
D
« La conférence,
« Considérant que nombre de personnes quittent encore leur pays d’origine pour des raisons de persécution et qu’elles ont droit à une protection spéciale à cause de leur condition particulière,
« Recommande aux gouvernements de continuer à recevoir les réfugiés sur leur territoire et d’agir de concert dans un véritable esprit de solidarité internationale, afin que les réfugiés puissent trouver asile et possibilité de réétablissement. »
E
« La conférence,
« Exprime l’espoir que la convention relative au statut des réfugiés aura valeur d’exemple, en plus de sa portée contractuelle, et qu’elle incitera tous les Etats à accorder dans toute la mesure du possible aux personnes se trouvant sur leur territoire en tant que réfugiés et qui ne seraient pas couvertes par les dispositions de la convention, le traitement prévu par cette convention. »
En foi de quoi, le président, les vice-présidents et le secrétaire exécutif de la conférence ont signé le présent acte final.
Fait à Genève, ce 28 juillet mil neuf cent cinquante et un en un seul exemplaire rédigé en langue anglaise et française, chacun des deux textes faisant également foi. Des traductions du présent Acte final en chinois, en espagnol et en russe seront faites par les soins du Secrétaire général des Nations unies, qui enverra, sur demande, des exemplaires de ces traductions à chacun des gouvernements invités à assister à la conférence.
Le président de la conférence KNUD LARSEN
Les vice-présidents de la conférence
A. HERMENT TALAT MIRAS
Le secrétaire exécutif de la conférence : JOHN P. HUMPHREY
Abatabizi bicwa no kutabimenya.
Nikozitambirwa.